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L'alimentation à l'Âge Viking

Sommaire

Les aliments

  • Les céréales et les graines
  • Les produits laitiers
  • Les viandes
  • Les produits de la mer
  • Les légumes
  • Les herbes et les épices
  • Les fruits et les fruits à coques

Les boissons

  • L'hydromel
  • La bière
  • Le vin

Les ustensiles et la vaisselle

  • Les ustensiles de cuisine
  • La vaisselle et les couverts

Zoom sur la corne à boire

Vidéo: Un repas à emporter (reconstitution historique par Hands on History)

 

À l'Âge Viking, les gens prenaient deux repas par jour: le dagverðr en milieu de matinée et le náttverðr le soir. Leur menu quotidien se composait essentiellement de gruaux et bouillies à base de céréales, de pain et de produits laitiers.

La viande et le poisson étaient sans doute des mets d'exception, bien que le poisson ait constitué une denrée majeure dans le Nord de la Scandinavie où le climat rendait difficile toute culture et la chasse. Le régime alimentaire devait en effet varier d'une région à une autre, où les denrées consommées étaient étroitement liées aux ressources disponibles à proximité de l'habitat, en dehors de certaines d'entre elles qui firent l'objet d'importations.

Quant aux us et coutumes en matière d'alimentation, ils ne sont pas restés figés tout au long de l'Âge Viking. La nourriture et la façon dont les aliments étaient cuisinés ont nécessairement évolué au fil du temps, des connaissances acquises et des contacts multiples noués par ces explorateurs et commerçants au cours de leurs voyages avec les autres peuples de l'époque. 

Les aliments

Les céréales et les graines

  • Seigle (Finlande, Suède et Danemark tardivement)
  • Orge
  • Avoine
  • Épeautre
  • Riz (importé d'Italie)
  • Plus rarement millet, sarrasin, blé
  • Graines de lin, de chanvre et de colza

 

Les farines étaient généralement réalisées à partir d'au moins deux types de céréales, l'une d'entre elles étant presque toujours l'orge. Les pains contenaient aussi fréquemment de la farine d’épeautre, de lin ou de pois, parfois d'avoine. Le seigle est devenu la principale céréale du pain dans le sud de la Scandinavie au cours de l'Âge Viking.

Les pains étaient généralement petits, fins et plats, semblables à des biscuits. Ils pouvaient être percés en leur centre afin d'être suspendus à une corde ou une barre en bois, ce qui les protégeait des rongeurs.

La cuisson du pain s'effectuait sur des pierres chauffées ou sur une plaque de fer placée au dessus du feu. Les fours à pain n'étaient pas très répandus, et certains chercheurs pensent que la cuisson au four du pain au levain ne s'est développée qu'avec la culture croissante du seigle.

Les graines étaient utilisées pour produire des huiles, comme à Jorvik ou à Dublin, telles que l'huile de lin, l'huile de chènevis et l'huile de colza.

 

Les produits laitiers

  • Lait de vache, de brebis et de chèvre
  • Petit-lait
  • Lait caillé
  • Beurre
  • Babeurre
  • Skyr (produit entre le yaourt et le fromage blanc)
  • Fromage (généralement très salé pour pouvoir le conserver)

 

Le lait, le plus souvent de vache, mais aussi de chèvre, n'était généralement pas consommé tel quel mais plutôt considéré comme une matière première pour créer d'autres produits laitiers capables d'être stockés et consommer pendant la période hivernale (période durant laquelle il n'y avait pas de production de lait).

Le skyr est une spécialité laitière islandaise de la même famille que le yaourt, bien que techniquement plus proche d'un fromage très frais, avec un goût légèrement acide et un arrière-goût sucré. Sa recette aurait été importée de Norvège en Islande par les Vikings, mais de nos jours la consommation de skyr n'est répandue qu'en Islande.

 

Les viandes

  • Poulet, canard, oie
  • Chèvre, mouton, agneau
  • Boeuf, vache, veau
  • Porc
  • Cheval
  • Gibier et oiseaux sauvages
  • Baleine, morse, marsouin, phoque

 

L'élevage de porcs était prédominant dans les colonies et les sites à forte densité de population car ces animaux permettaient de recycler les déchets alimentaires et pouvaient être parqués.

L'élevage de volailles (poulet, canard, oie) permettaient de founir des oeufs et de la viande tout au long de l'année. 

L'élevage de bovins était  important. Certaines étables dans les fermes de l'Âge Viking pouvaient accueillir jusqu'à 80 à 100 têtes de bétail, essentielles à la réalisation des produits laitiers qui étaient plus prisés encore que la viande elle-même.

La viande était un produit saisonnier: l'abattage se faisait principalement à la fin de la saison de pâturage pour les bovins, soit en Octobre pour les moutons et en Novembre-Décembre pour les porcs. Ainsi, les éleveurs évitaient de devoir les nourrir pendant l’hiver et pouvaient gérer au mieux le stock de foin récolté pendant l’été.

La viande de gibier (cerf, élan, renne, lièvre, ours, sanglier, écureuil) était peu consommée, hormis dans les régions les plus au Nord de la Norvège et de la Suède. La chasse concernait aussi des oiseaux sauvages (pluvier doré, pluvier gris, tétras, palombe, vanneau, oie sauvage), des oiseaux de mer et leurs oeufs, des phoques, des morses et des baleines.

Les différentes méthodes de conservation de la viande étaient le séchage et le fumage (les plus répandus), la fermentation (l'animal non ouvert est placé le plus souvent dans une fosse à l'abri de l'air pour que la viande fermente), la marinade dans du petit-lait, le saumurage et le salage. 

 

Les produits de la mer

  • Morue, saumon, hareng, aiglefin, lingue, chinchard, éperlan, lieu noir
  • Anguille, brème, brochet, gardon, perche, rotengle
  • Huîtres, coques, moules, bigorneaux, pétoncles, crevettes
  • Algues comestibles

 

Il s'agit aussi bien de poissons, de crustacés, de coquillages que d'algues. 

La Dulse (Palmaria palmata) appartient à la famille des algues rouges. C'est une algue fine à la saveur douce encore consommée telle quelle en Irlande, en Écosse, et surtout en Islande. Facile à récolter sur le rivage, séchée et stockée pendant de longues périodes, elle représente une excellente source de nombreuses vitamines et minéraux. 

Les poissons, qui étaient sans doute les plus largement consommés, se conservaient essentiellement par fumage et séchage à l'air libre (stockfisch).

 

Les légumes et les plantes

  • Champignons
  • Carotte sauvage, panais, navet, céleri, céleri sauvage, radis, oseille, chénopode blanc (consommé comme les épinards), pissenlit,
  • Chou, endive (île de Funden)
  • Fèves, pois
  • Oignon, ail rocambole et ail commun

 

À cette liste, peuvent s'ajouter les betteraves, champignons, poireaux et oignons.

En plus des légumes cultivés, des plantes sauvages telles que l'ortie, l’oseille, le cresson et le chénopode blanc pouvaient être récoltées. 

Les légumes étaient généralement conservés par séchage.

La sabline et les glands ont pu être consommés en période de famine.

 

Les herbes et les épices

  • Aneth, coriandre, houblon, fenouil, cresson, raifort, livèche, fenouil des montagnes, persil, menthe, thym, marjolaine, angélique officinale, achillée millefeuille
  • Graines de pavot, moutarde, moutarde noire (ou sénevé noir), carvi ou cumin des prés, baies de genièvre

 

Les vikings ont eu également accès, grâce aux comptoirs commerciaux, à des épices exotiques telles que le cumin, le poivre, le safran, le gingembre, la cardamome, la maniguette, les clous de girofle, la muscade, le macis, la noix de muscade, la cannelle, l'anis, et les feuilles de laurier.

Le vinaigre est à ajouter à cette liste des condiments connus à l'époque.

 

Les fruits et fruits à coques

  • Mûres, myrtilles, framboises, fraises des bois, cerises
  • Pommes (attestées notamment par une découverte dans la sépulture d'Oseberg)
  • Baies de sorbier, prunelles, baies de sureau, d'aubépine
  • Noisettes, noix et par importation amandes, chataignes 
  • Figues et raisin (attestés par des découvertes archéologiques dans des contextes spécifiques)

 

Dans le nord de l'Allemagne et le sud du Danemark, les archéologues ont aussi découvert des noyaux de pêches, qui ont probablement été ramenés d'un voyage.

Les fruits étaient généralement conservés par séchage, et parfois dans du miel, seul édulcorant disponible.

 

Les boissons

Les boissons alcoolisées occupaient une place importante dans la culture nordique, et les peuples scandinaves avaient une conscience aiguë des périls et dangers de l'ivresse comme en témoignent les sources écrites. La bière était de loin la plus couramment consommée, y compris dès le plus jeune âge.

L'hydromel

L'hydromel (mjöðr en vieux norrois) est l'une des boissons alcoolisées les plus anciennes en Scandinavie et en tant que nectar des dieux cité dans mythologie nordique, la plus emblématique.

Dans les sagas, l'hydromel est la boisson des poètes et de l'éloquence. Le service de l'hydromel s'illustre dans la littérature à la fois comme le devoir et la prérogative des rois.

À la différence des ruches modernes composées de cadres en bois amovibles, les ruches de l'Âge Viking étaient des dômes de paille - qui sont à l'origine encore aujourd'hui de notre représentation iconographique de la ruche. Cela impliquait que les colonies d'abeilles soient décimées afin de  prélever la cire et le miel, soit par étouffage en brulant une mèche souffrée, soit par noyade.

 

La bière

La céréale de base cultivée durant l'époque des Vikings était l'orge, et il se peut même qu'elle ait été la seule céréale cultivée en Islande jusqu'au moment où la petite période glaciaire du XIVème siècle rendit tout à fait impossible la culture céréalière. L'orge était utilisée pour brasser la bière, qui était la boisson de base de toutes les classes sociales. Même les enfants buvaient de la bière au quotidien, en particulier dans les zones les plus fortement peuplées.

 

  • Étymologie

Alors qu'aujourd'hui les noms modernes "bière" et "ale" sont presque interchangeables, les deux boissons étaient très différentes au départ. D'après les sources littéraires, le nom en vieil anglais ealu et le nom en vieux norrois ol s'appliquaient à une boisson produite à partir de céréales maltées, alors que le nom en vieil anglais beor et le nom en vieux norrois björr s'appliquaient à une boisson alcoolisée sucrée. Jusqu'à très récemment, les philologues pensaient encore que beor et björr étaient des dérivés du mot pour "orge" alors que le terme désigne probablement le "cidre" (qu'il s'agisse de pommes ou de poires) à l'époque des Vikings. Les traductions anglaises des Sagas traduisent les deux termes öl et björr indifféremment par bière ou ale, et ne sont donc pas une source fiable concernant  la terminologie des textes originaux en vieux norrois. Pour parachever la confusion, une variété de termes en vieux norrois liés aux boissons fermentées apparaissent dans les versets 34 et 35 du poème eddaïque Alvíssmál,  et tous sont implicitement des synonymes. Le terme mungát lui, servait à désigner une bière particulièrement forte.

Les recettes exactes et les méthodes que les Scandinaves de l'époque viking utilisaient pour produire de la bière sont inconnues. Cependant, les experts pensent que certaines pratiques du brassage de la bière en milieu rural dans l'Ouest de la Norvège jusque dans les pays baltes sont héritées des techniques vikings.

 

  • Kveik (levures) et kveikal ("bâton magique")

Les levures kveik norvégiennes sont un groupe génétiquement distinct de levures de bière domestiquées, Saccharomyces cerevisiae. Bien que faisant partie de cette famille selon une étude de 2018, elles contiennent entre 3 et 7 souches, là où les levures de bière modernes sont mono ou bi-souches.

En Finlande, une légende veut qu’elles proviennent de la salive des sangliers (une pratique confirmée par une étude ethnographique en 1948). Les premières traces écrites officielles de ces levures datent de 1780. Il est très difficile de dater leurs découvertes et leurs utilisations, mais leurs répartitions géographiques et leur mode de brassage très similaire en Scandinavie, dans les pays baltes et en Russie, font penser qu’elles ont pu être diffusées par les Vikings entre les VIIIème et XIème siècle. Et elles pourraient même être encore plus anciennes.

Les levures Kveik ont des propriétés très pertinentes pour le secteur brassicole, elles ont généralement une floculation élevée, pas de phénols au profil neutre (POF-), et tolérent les hautes températures. Les levures Kveik fermentent ainsi entre 30 et 40° (contre une moyenne de 15 à 20° pour les levures Ale) et produisent un taux d’alcool entre 13 et 16%. 

À l'Âge Viking, ces levures étaient recueillis sur un 'bâton magique', appelé kveikal en Norvège, jästkubb en Suède, qui était conservé précieusement pour le brassin suivant. Ce bâton magique se transmettait de génération en génération. De nos jours la tradition se perpétue encore; les levures, appelées gjær en norvégien, sont recueillies sur le haut de la cuve de fermentation à l’aide d’un anneau de bois assez complexe, appelé gjærstokk, où elles sont mises à sécher.

 

  • Le brassage traditionnel

Dans un premier temps, les brasseurs font infuser des branches de genièvre dans de l’eau, à une température d’environ 80°. Lorsque cette chauffe est réalisée au feu de bois, cela peut prendre assez longtemps, si le feu n’est pas très important comme vous pouvez l’imaginer. En parallèle, on prépare le malt en le mélangeant avec un peu de l’infusion au genièvre. Le malt est incorporé dans une cuve de sédimentation, et on verse le restant de l’infusion pour le porter à une température d’environ 70°. Le mélange est brassé durant 3 à 6h, mais ne doit pas descendre au-dessous de 50°, afin d’éviter qu’il devienne acide. Le moût est par la suite transféré dans une cuve, où l’on ajoute du houblon et d’autres ingrédients éventuels comme des fleurs, puis est bouilli pendant 4h, afin de réduire son volume d’une bonne moitié. Un peu de houblon peut être ajouté de nouveau 15 à 30 minutes avant la fin de l’ébullition. Après refroidissement à une température comprise entre 30 et 40° (parfois même légèrement plus), la levure Kveik est enfin ajoutée, pour effectuer une fermentation à chaud qui dure de 3 à 4 jours avant le soutirage final.

Les additifs servent à ajouter d'autres saveurs, produire de l'amertume, tuer les bactéries et prolonger ainsi la durée de conservation de la bière, ou développer des propriétés médicinales. Une variété d'ingrédients naturels sont historiquement utilisés, comme le houblon, le genévrier, la menthe-coq (Tanacetum balsamita), le lierre terrestre (Glechoma hederacea), ou le gruit, soit un mélange de plantes composé le plus souvent de piment royal ou myrte des marais (Myrica gale), d'achillée millefeuille (Achilea millefolium), de lédon des marais ou lédum palustre (Rhododendron tomentosum), toutes utilisées au Danemark, en Allemagne du Nord et en Angleterre. Le marrube (Marrubium vulgareappelé Berghopfen ou "houblon de montagne") a été utilisé en Allemagne comme substitut du houblon.

Le brassage était habituellement le travail des femmes dans l'Islande médiévale, et il en était probablement ainsi dans toute la Scandinavie à l'époque viking. En outre, une étude archéologique en Norvège, portant sur un grand nombre de pierres craquelées découvertes dans les fermes de l'époque, défend l'hypothèse selon laquelle les Vikings brassaient leur bière aux moyens de pierres chauffées.

 

  • La consommation

La consommation de bière possédait une dimension rituelle, notamment à l'occasion de plusieurs célébrations religieuses et de trois grandes fêtes saisonnières: la première se déroule après la récolte, la seconde aux alentours de la mi-hiver, et la dernière à la mi-été. Ces fêtes se sont perpétuées même après l'introduction du christianisme, bien que sous des noms nouveaux. 

Les sources historiques révèlent que la consommation de bière, même à l'époque chrétienne, restait très importante: la loi Gulaþing exigeait qu'un goupe d'au moins trois individus s'attèle au brassage de la bière qui serait consommer aux incontournables banquets de la Toussaint (1 Novembre), de Noël (25 Décembre -Yule), et lors de la fête de saint Jean-Baptiste (le 24 Juin). Ceux qui n'avaient pas réussi à brasser la bière pendant trois années consécutives devait donner la moitié de leur ferme à l'évêque et l'autre moitié au roi, puis quitter le pays. Seules les très petites fermes étaient exemptées de respecter cette réglementation très stricte.

Les festivités ou occasions plus ordinaires, célébrées aujourd'hui encore, sont si étroitement associées à la bière qu'elles sont connues sous des noms en vieux norrois composés avec le suffixe "öl" ("bière") telles que gravöl ("funérailles-bière", soit une veillée funèbre), barnöl ("enfant-bière", soit un baptême) et taklagsöl ("toiture-bière", soit l'édification d'une grange). 

 

Le vin

Le vin était la boisson fermentée la plus recherchée en Scandinavie, mais aussi la plus onéreuse.

Le vin de raisin était essentiellement importé de la Rhénanie au Danemark, en utilisant les comptoirs commerciaux de Dorestad et Hedeby (Haithabu). En conséquence, le vin était réservé aux riches et aux puissants. 

Deux pépins de raisin datant de la fin l'Âge du Fer et de l'Âge Viking qui ont été découverts en 2017 sur le site aristocratique de Tissø (île de Seeland, Danemark) indiquent que les Vikings ont probablement cultivé de la vigne localement. Les conditions de production de vin à l'Âge Viking, et peut-être même dès l'Âge du Fer, étaient réunies:

  • Les Vikings avaient pu acquérir les connaissances nécessaires à la viticulture au cours de leurs voyages en France et en Angleterre.
  • Les Vikings avaient un goût prononcé pour les boissons alccolisées.
  • Le climat de l'époque à ces latitudes était semblable au nôtre grâce à l'optimum climatique médiéval.
  • Produire du vin à l'Âge Viking aurait constitué un symbole ostentatoire de pouvoir pour un notable.

 

Toutefois, les scientifiques ne sont pas encore en mesure de déterminer si la viticulture servait à consommer des raisins frais, à produire des raisins secs comme aliment pour les longs voyages en mer ou bien à fabriquer du vin. (cf. Danemark - Les Vikings ont peut-être bien fait pousser de la vigne)

Par ailleurs, une très petite quantité de vins de fruits était exclusivement réservée à un usage sacramental. 

Quant au jus de bouleau, il a pu également être utilisé pour fabriquer des quantités limitées de vin. 

 

Les ustensiles et la vaisselle

Les ustensiles de cuisine

Chaudron daté de 834, découvert dans la tombe d'Oseberg - Photo: Eirik Irgens JohnsenLa nourriture était le plus souvent bouillie dans un chaudron suspendu au-dessus du foyer central par une chaîne en fer ou des crochets accrochés à une poutre de la maison.

Les chaudrons étaient en pierre ollaire ou en fer. Mais une étude, publiée en février 2020, a démontré à partir d'analyses effectuées sur 208 squelettes d'un ancien cimetière de Ribe que le cuivre et ses alliages ont également servi de matériaux pour fabriquer des ustensiles dès l'Âge Viking, en particulier dans les centres urbains de l'époque.

Les chaudrons en fer étaient fabriqués à partir de minces plaques de fer rivetées ensemble pour former le récipient. D'une épaisseur de 6 mm, d'après le livre de droit islandais médiéval Grágás (K 246), le chaudron standard pesait 18 kg pour une capacité de 30l, ce qui semble adapté au regard du nombre de personnes à nourrir vivant ensemble sous le toit d'une maison longue. 

Les aliments était également préparés par rôtissage dans des pots en pierre ollaire. Presqu'aucun éclat de pot en argile n'a été découvert dans les pays nordiques et les principales colonies vikings utilisaient quasi exclusivement de la stéatite. Cette pierre tendre, mais plus robuste que l'argile, présente l'avantage de pouvoir être percée, ce qui permet de suspendre l'ustensile par des crochets ou une crémaillère au-dessus du feu, et de le réparer avec des agrafes en fer lorsque le récipient est cassé ou fissuré.

Les viandes pouvaient être grillées sur le feu à l'aide de broches en fer telles que celle découverte à Sekse, dans l'ancien comté de Hordaland en Norvège, dont la tête longue de 32 cm est en forme de fouchette à deux dents longues de 11cm chacune, ou bien d'un gril en forme de spirale tel que celui découvert à Bergen en Norvège, avec des spirales de dimensions variables de 6 à 17 cm.

Le pain était cuit sur une poêle plate avec des bords très légèrement relevés, de 20 à 25 cm de diamètre équipée d'une longue poignée fixée par 1 à 2 rivets. 

Il était aussi très courant de recourir à des pierres chaudes tirées du foyer pour réchauffer les boissons. Elles servaient notamment au brassage de la bière, d'après les travaux de l'archéologue Geir Grønnesby. Ces pierres craquelées par la répétition de cette opération sont découvertes, parfois en très grande quantité, sur la plupart des sites archéologiques de l'Âge Viking. 

 

La vaisselle et les couverts

Vaisselle du IXème siècle découverte dans la tombe d'Oseberg - Photo: Eirik Irgens JohnsenLa vaisselle des Vikings était surtout fabriquée en bois. Elle se composait de bols et de tranchoirs, ou tailloirs, pour recevoir les préparations culinaires.

Le couteau servait aussi de fourchette. Les cuillères étaient faites en bois ou en os et parfois en corne. 

De nombreuses pièces raffinées pour le service des boissons ont majoritairement été trouvées dans des tombes de femmes, de l’Âge du Fer romain germanique jusqu’à l’Âge Viking. 

Les tasses en bois tourné, simples, sans anses, étaient probablement les plus couramment utilisées à l'époque viking. Quelques unes d'entre elles se sont conservées: 8 dans la sépulture d'Oseberg, 4 dans celle de Gokstad, et 14  mesurant de 48 à 107 mm de hauteur et de 76 à 100 mm de diamètre ont été découvertes sur l'ancien site d'Haithabu. 

Il existait aussi des tasses en bois avec des anses très semblables au guksi (kuksa en finnois, ou kåsa, en suédois) traditionnellement fabriquées par les samis du nord de la Scandinavie à partir de loupe de bouleau, et sculptées. Deux d'entre elles ont été trouvées dans la sépulture de Gokstad, une dans la tombe d'Oseberg et en plus grand nombre sur le site d'Haithabu

Les tasses en céramique complètes de l'Âge Viking en Norvège sont presque toujours non décorées et sont plutôt rares. C'est la raison pour laquelle certains chercheurs prétendent que la Norvège ne produisait pas de céramique à cette époque. Néanmoins, 12 récipients en stéatite découverts sur différents sites pourraient avoir fait office de gobelet car ils mesurent moins de 15 cm et pas plus de 5 à 6 cm de diamètre, sans trace d'élément en fer.

 

Verre de l'Âge Viking découvert dans une tombe à Hopperstad en Norvège - Photo: Unimus.no B4511La vaisselle de loin la plus luxueuse se composait de gobelets en verre importés dans les pays scandinaves depuis le continent ou l'Angleterre. La verrerie la plus importée provenait sans doute de la région du Rhin, comprenant de grands gobelets et de petits pots et flasques en verre bleu, vert, ou brun, souvent décorés avec l'application de filaments. 

En outre, il existait une production unique en son genre à destination du marché scandinave: des cornes à boire en verre, des gobelets à griffes (des verres à boire sur lesquels étaient appliqués des filaments de verre sur les côtés ressemblant à des griffes), des gobelets en forme d'entonnoir venant se placer sur des supports en fer, et des gobelets au fond arrondi en forme de sac. 

Les verres étaient connus en vieux norrois sous le terme hrimkaldar, ou "coupes de givre". Les verres en entonnoir étaient les plus répandus au Xème siècle. Certains d'entre eux semblent avoir été utilisés pendant très longtemps: le gobelet du monticule de Borre (vers 900) date du VIIème ou VIIIème siècle.

 

 

Coupe du Xème siècle découverte à Jelling - Photo: Musée national du DanemarkÀ la marge, il a été mis au jour en Norvège et au Danemark des coupes en argent provenant peut-être du continent. L'une d'entre elles, découverte dans une sépulture royale de Jelling dans la province du Jutland, au Danemark, donne son nom au style d'art viking pour la période de 900 à 975: le style de Jelling.

L'écorce de bouleau (tombe de Kyrkhus), le bois de cerf ou le polypore (tombe de Voll) sont d'autres matériaux qui auraient pu servir à fabriquer des gobelets ou des bols.

Zoom sur la corne à boire

Corne à boire découverte dans une sépulture de l'Âge Viking à Vold en Norvège - Photo: unimus.no T1184Les cornes à boire sont probablement les récipients les plus symboliques et les plus emblématiques de l'Âge Viking dans les représentations populaires.

Il s'agissait de cornes de bovin domestique ou de cornes de chèvre comme le prouvent les quelques rares vestiges de cornes à boire - la plupart d’une contenance inférieure à un demi-litre - ou les représentations iconographiques. En ce sens, les cornes d’aurochs nettement plus grandes découvertes dans la sépulture de Sutton Hoo (antérieure à l'Âge Viking), auraient été une exception bien qu'elles servent souvent d'illustrations.

Les cornes utilisées par les Vikings étaient soigneusement polies et généralement décorées de quelques lignes incisées. Pour les notables et plus fortunés, elles étaient ornées de pièces d’orfèvrerie à l’embouchure et à la pointe.

De nos jours, la corne à boire passe pour être la seule vaisselle avec laquelle les Vikings buvaient. Mais d'après les sources écrites telles que les sagas islandaises, les cornes auraient été plutôt réservées aux grandes occasions, utilisées pour les cérémonies et rituels, les célébrations saisonnières ou encore des fêtes dédiées à la boisson comme la solennelle fête de la bière de sumbel ("sumbl" en vieux norrois) évoquée dans les récits de Beowulf et l'Edda. Elles servaient donc à boire l'hydromel, le vin et la bière.

Les chercheurs estiment que l'ancienne tradition d’ornementation des cornes à boire a pu perdurer au Moyen Âge, dans les régions rurales de Norvège, sous la forme essentiellement d'un décor végétal: "La plupart des cornes à boire norvégiennes préservées du Moyen-Âge relèvent de l’art de l’orfèvrerie, puisque la plupart des diverses ornementations sont élaborées sur des montages métalliques, tandis que les cornes elles-mêmes sont lisses et non ornementées. Les sculptures connues sont relativement tardives et presque toutes ont une simple décoration incisée qui les classifie en tant qu’art populaire. Elles ont été, en fait, gravées dans des contrées rurales norvégiennes et le style de la gravure est si simpliste qu’il est difficile d’établir si les cornes datent en réalité du Moyen-Âge. L’ornementation est dominée par la représentation de style roman, de tiges entrelacées et de feuilles "  (Magerøy, Ellen Marie.  "Carving: Bone, Horn, and Walrus Tusk." Medieval Scandinavia: an Encyclopedia. Phillip Pulsiano et al., eds. Garland Reference Library of the Humanities 934. New York: Garland.1993. p. 70).

Repas à emporter (reconstitution historique par Hands on History)

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Commentaires

  • Paul
    • 1. Paul Le 30/01/2022
    Merci pour toutes ces informations, je dois faire une scène 3d vraisemblable de l'intérieur d'un maison.
    Je vais faire ça pour une maison longue et je cherche plein d'info pour remplir ma scène.

    et super les liens et autres articles que vous proposer.
  • Anthony
    Bonjour, merci pour cet article bien décrit et très intéressant. Anthony
  • clement
    • 3. clement Le 14/07/2020
    Bonjour,

    Savez-vous dans quoi les boissons étaient conservées? Est-ce que les vikings utilisaient des tonneaux ou autre chose? Désolé si vous l'avez mis dans l'article et que je suis passé à côté.

    En tout cas merci beaucoup pour votre site qui apprend énormément de choses et de manière pédagogique.
    • idavoll
      • idavollLe 14/07/2020
      Bonjour Clément, Et merci pour l'intérêt que vous portez à Idavoll. Je n'ai pas pour le moment de source précise à ce sujet. Mais l'on peut aisément avancer que les Vikings devaient en avoir à leur disposition. Le tonneau est utilisé dès le début de notre ère et son emploi se répand au IIIème siècle, en particulier parce qu'il facilite la conservation et le transport des denrées périssables. Au vu de leurs contacts répétés avec différentes cultures méridionales, du commerce qu'ils pratiquaient et du goût des Vikings pour l'alcool, cela est plus que probable. Bien à vous, Kernelyd

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